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"Ne faites pas de supposition" -Les Accords Toltèques- épisode 2


Rappel de l'épisode précédent si vous l'avez loupé ou si vous lisez d'abord le dernier post :

«Il ne s'agit pas d' un temple ancestral Maya revisité aux normes PMR, avec ascenseur et couloirs larges. Cela tient dans la poche, fait office de GPS si on est paumé à un moment de sa vie et en plus, c' est réutilisable.

J'ai nommé «les quatre Accords Toltèques» de Don Miguel Ruiz. Quatre accords majeurs, qui peuvent suffire à jouer la gamme de l'existence.

Je me suis amusée à illustrer ces accords toltèques à la lumière de situations liées au handicap/la maladie.»


Accord Toltèque numéro 3 : "ne faites pas de supposition".

Notre cerveau étant conditionné à se faire des films depuis la nuit des temps, la démarche ne va pas être simple.

Comment distinguer une hypothèse d'une supposition ? L'analyse d'une situation d'un procès d'intention? (Et les rimes involontaires en «ion» sont-elles passibles de sanctions?)


Téléportons nous dans l'ambiance frigorifique et hygiéniste d'un centre de rééducation fonctionnelle.

Un médecin rééducateur MUTANT est assis devant moi. C'est une forme hybride entre un courant d'air hyperactif et un souverain qui fait tomber la foudre d'un claquement de langue.

Prononcer son nom suscite bruissements de voix et regards entendus.

Depuis que je le connais, il arrive à placer dans toutes ses phrases les mots «conférences», colloques» ou «ministre», ce qui est très, très fort.


Nous convenons que ma marche devient de plus en plus difficile et je lui annonce que je suis prête pour l'expérience «fauteuil» (cf le post «de Décathlon au fauteuil»).

D'aucuns payent très cher des «expériences insolites» pour retrouver un émerveillement tué par l'ennui; moi aussi je saute dans l'inconnu mais pas pour conjurer la lassitude du quotidien. Un invisible nœud au ventre tapisse l'arrière de mon nombril.

Il trouve que le temps est venu, lui aussi.


Tac tac boum. A la «Bébel» (pour ceux qui ont la référence), il va chercher l'ergothérapeute du service pour entamer les démarches.


Une jeune trentenaire dynamique et souriante m'assure d'un RDV dans les jours prochains.

Waouh! Im-pres-sion-née par l'efficacité du travail d'équipe.

Les jours passent, je laisse deux messages sur le répondeur de la jeune femme. Pas de nouvelles. Bizarre.

Un mois plus tard, nouveau RDV chez le CHEF du Service du Monde de la Galaxie Interplanétaire (SMGI).

« Ben j'comprends pas, j'ai pas eu de nouvelles de Mme....On en est au même point.»


Bébel s'est levé – A t-il pris un hélicoptère, une Batmobile- je ne sais pas, mais il est revenu 3 mn plus tard avec l'ergothérapeute rouge comme une tomate sous serre chauffée à bloc.

«Je vous laisse mon bureau, voyez avec Madame pour son fauteuil.»

Et il part (sans doute au Ministère pour une conférence dans le cadre d'un colloque).


La fille est passée de 39 degrés à -2 , avec un petit vent glacial. Du givre commençait à se poser sur le coupe- papier du bureau qui se rapprochait du visuel du pic à glace.

Je lui explique ma demande: un fauteuil électrique pliable pour aller dans un coffre de voiture, qui me soulage pour des trajets supérieurs à 600m en continu. J'avais la marque et le modèle, suite à mes recherches personnelles.


«Je vais appeler notre prestataire. […]. Oui, allô, c'est encore moi. J'ai en face de moi une dame qui veut un fauteuil qui ne fasse pas handicapé. T'as ça?»


Waouh! Sidérée par la déformation de mon besoin et la violence de la munition.


Un film en dolby stéréo s'affiche dans mon esprit:

Me détesterait-elle parce que le grand Mamamouchi m'a «à la bonne»?

Me ferait-elle payer un possible savon de 3 minutes au gant de crin par Zeus ?

Pourquoi ne pas avoir répondu à mes messages durant 1 mois alors qu'elle était toute souriante la 1ère fois?

Serait -elle bipolaire?

Va-t-elle me pousser dans les escaliers avec un rire sardonique?


Bref, le film vire au n'importe quoi et, si je ne réagis pas très vite, la somme de mes supputations va servir à épaissir une soupe de ruminations.

Supposition commençant par «suppositoire» , elle a aussi vocation à se rapprocher de «transitoire», histoire de rimer avec.


Je décide de clarifier la situation avec le moins d'affect possible ("Cf accord toltèque n°2 : ne pas en faire une affaire personnelle).

«J'ai la sensation que ma demande vous pose un réel problème. J'aimerais comprendre la situation et l'apaiser. Pouvez-vous m'éclairer sur ce qui se passe? » ( sans rire, c'est vraiment ce que j'ai dit: j'avais le 3ème accord Toltèque qui s'affichait en lettres d'or au dessus de sa tête).


Elle a été hyper surprise et a pu exprimer son ressenti.

«J'ai un problème d'éthique avec vous. Il y a des gens qui attendent depuis des mois à cause du Covid et vous, hop, il faut que je vous voie rapidement parce que le médecin l'a décidé.

Bon, en même temps, votre demande est très claire et vous n'allez me prendre que 30 mn en tout donc ça va aller.»


J'ai compris sa position, l'ai assurée de ma bonne foi et de l'absence de jérémiades auprès du médecin pour être prioritaire, ce qui était la stricte vérité. Elle aurait certes pu réagir autrement qu'en faisant la morte puis la passive-agressive, avec le cran de se confronter au médecin. Mais chacun fait comme il le peut. Elle s'est radoucie et le processus a pu s'activer.


Ne pas faire pas de suppositions, poser des questions et adopter une vision authentique multifocale dénuée de contrefaçons. C'est donc ça, la solution !


Résultat: le film des supputations s'est clôturé par un générique final avec un temple Maya en arrière fond. Je dévalais les escaliers avec mon fauteuil Ergo 8 L.

Accroché à un hélico par les pieds, un type en blouse blanche jouait de la flûte des Andes. Sans doute revenait-il d'un colloque. Une hypothèse.


La pilote de l'hélico, une femme en blouse blanche également, le fixait d'un air mauvais.

Elle fonçait droit vers le temple Maya, vouant Bébel à un avenir proche de la compotée.

Vengeance personnelle.

Mais ça, c'est une supposition.



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